Un sujet brûlant agite le monde des lettres et les colonnes des gazettes pendant l’été 1891. Marie-Louise Gagneur (1832-1902), qui a publié des livres remarqués, n’en peut plus d’être appelée « auteur » ou « écrivain ». Elle s’adresse à l’Académie française pour que celle-ci prenne en considération la féminisation de certains mots dont le masculin s’est assuré l’exclusivité.

En 2019, ça va mieux. Mais il y a fallu du temps, et il n’est pas inutile de rappeler un épisode de ce long combat qui passionnait, cette année-là, si pas les foules, au moins le monde intellectuel français.

Parmi les nombreuses réactions rassemblées dans ce dossier articulé autour de deux lettres signées par Marie-Louise Gagneur – reprises par plusieurs journaux –, on trouve tout ce qui pouvait caractériser la société de l’époque devant les revendications linguistiques d’une femme. Beaucoup de condescendance, en particulier dans les milieux d’une Académie qui ne fait pas mentir sa réputation (sa vocation, dit même Leconte de Lisle) conservatrice. Un peu de moquerie puérile – pourquoi cette femme de lettres ne signe-t-elle pas Gagneresse ou Gagneuse, se demandent deux chroniqueurs (car il n’y a aucune chance pour que cela soit écrit par des chroniqueuses) ? Mais aussi des encouragements et un appel à aller plus loin…

Aujourd’hui, l’Académie française rebaptise Marie-Louise Gagneur autrice, auteure ou écrivaine. Mais sans grande conviction, en notant que le féminin d’auteur est un cas épineux et que la forme écrivaine se répand sans s’imposer. Un pas a été fait. Le chemin est encore long, dont nous voici à revisiter un fragment.

0,99 euros ou 3.000 ariary

ISBN 978-2-37363-081-7